Le journalisme des faits divers, du "one shot sensationnel", du remplissage, de l'intermédiaire de la parole partisane à charge ou à décharge sur un sujet de société ou la défense d'une cause, a le don de m'agacer car souvent les propos rapportés ne sont pas loin de la "fake news" ou du partie pris. Rien ne vaut le factuel, l'information recoupée, complétée par d'autres présentations, la distinction entre ce qui relève de l'opinion ou l'avis personnel de la personne mise en avant. De la même manière, la reprise en boucle orchestrée d'un événement pour faire campagne par commentaires partisans est tout aussi irritante.
Aujourd'hui, pour beaucoup de ceux qui se disent naturalistes, défenseurs de la cause et de la protection animale, du spécisme, welfarisme ou autre appellation, la finalité de leurs attaques est de mettre au ban de la société, le chasseur afin de pousser le politique à légiférer sur la sanctuarisation des animaux chassées ou piégés. Et dans ces manœuvres, tout est "bon comme dans le cochon" avec, comme dans le fashion, des influenceurs, des youtubeurs "professionnels" en quête d'audience pour vivre, la mise en avant de l'expertise de personnes engagées. S'il y a un critère qui devrait d'ailleurs mettre la puce à l'oreille de lecteurs, c'est bien les appels aux dons ou autres cagnottes qu'on peut voir afficher dans des bandeaux de sites ou publications Facebook, sous prétexte d'aider à garder l'autonomie financière des auteurs. Lorsque votre gagne pain dépend du nombre de like, le risque est grand de perdre son âme et pousse à exploiter tout ce qui peut permettre de produire de l'audience. Se battre pour quelque chose de juste et légitime perd souvent de la crédibilité lorsque l'intéressement plane dans l'ombre. En ce sens je rejoins totalement Aldo Leopold, grand défenseur de l'environnement américain au début du XX siècle et auquel je me réfère souvent, lorsqu'il écrivait : « une action est juste, quand elle a pour but de préserver l'intégrité, la stabilité et la beauté de la communauté biotique*. Elle est répréhensible quand elle a un autre but. » (* ensemble des êtres vivants qui compose un écosystème).
Les Dernières Nouvelles d'Alsace n'échappent pas, comme presque tous les médias actuellement, à la tendance opportuniste du moment de produire des articles autour du thème des animaux "pourchassés". Pourquoi pas, il faut bien vivre et vendre, alors tantôt c'est le renard, tantôt le loup, tantôt le lynx et dans le cas de ce post, le blaireau, qu'on présente à tour de rôle sous le meilleur jour. Dans la vraie vie, rien n'est toujours complètement rose ou noir. Un renard mange certes le mulot, mais aussi le faon de chevreuil, le levraut, la perdrix, la poule faisane, les œufs du nid de courlis, le grand hamster. Un blaireau mange effectivement tout, mais à choisir entre un vers de terre et les plats du renard, son choix est vite fait, notamment en période de nourrissage des petits. Le déterrage, tant décrié actuellement de ces deux espèces, lorsqu'il atteint la chambre pour récupérer un chien trop audacieux, en dit plus long sur le menu du petit ours ou de goupil que ce que le plus souvent il nous est donné à croire. Les deux savent être frugivore, mais restent des carnassiers tout comme le chat mange des croquettes mais préfère une jeune mésange, tout comme le geai au si beau plumage, mange des glands, mais recherche au printemps les nids et les jeunes oiseaux (moineaux, fauvettes, mésanges tout particulièrement).
Tout est question d'équilibre, les passereaux sont aujourd'hui en danger, non à cause d'un quelconque homme chasseur, mais d'un manque de survie des reproductions qui ne parviennent plus à absorber le taux de mortalité croissant dû aux prédateurs. La survie de la perdrix est pratiquement une cause perdue, non à cause du méprisable chasseur qui au contraire fait tout pour la sauvegarder, mais parce que chaque oiseau ou œuf passé sous les dents de son ennemi rapproche un peu plus de l'extinction. Le renard en densité supportable au regard de ses proies reste le docteur de la chasse, en surnombre, il est nuisible à la survie de la biodiversité. Le blaireau peut être dénommé le Teddy bear alsacien, il n'en reste pas moins qu'il est capable de grands dégâts sur faune et agriculture que ce soit l'orge, le blé et surtout le maïs. Aucun chasseur responsable et digne d'exercer son art ne cherche l'éradication de ce qui s'appelait du temps de la ruralité et des cycles naturels, les "nuisibles", parmi lesquels figuraient en plus les rapaces. Pour autant, ces derniers restaient nombreux, ce qui n'est plus le cas des becs et pattes crochus aujourd'hui, alors que le chasseur "bizarrement" n'est plus dans le jeu, contrairement aux camions et voitures à grandes vitesses.
L'être humain est fait de contradictions, lorsque le renard empêche le retour du grand hamster, il devient ESOD, lorsqu'il contribue fortement à la disparition d'une espèce chassable, il est sanctuarisé. Idem pour le blaireau largement protégé, malgré son impact sur la petite faune sauvage en danger, mais lorsqu'il est décrié par les vignerons, les exploitants agricoles ou les maraîchers, soit lorsqu'il touche aux intérêts économiques et non à la petite faune susceptible d'être chassée, il devient une menace.
Au final, tout cela tient de la duperie, aujourd'hui, une minorité tente de devenir majorité en faisant tout pour obtenir le classement du chasseur en nuisible, en jouant et comptant sur la corde sensible des jeunes générations élevées aux films animées avec des animaux acteurs et dotés de parole, en profitant de clichés ou d'amalgames faciles offerts par l'actualité ou les faits divers.
Défenseur de la planète n'est pas un métier, mais un engagement au quotidien personnel par des gestes simples qui partent d'éteindre les lumières inutiles, de couper l'eau qui coule si facilement du robinet, de laisser au garage la voiture pour les petits déplacements de proximité, de privilégier une petite laine au chauffage boosté, de se désintoxiquer des notifications permanentes sur les écrans d'accueil des téléphones et autres tablettes, de privilégier une alimentation non transformée par l'industrie ou "comme j'aime", d'oublier l'industrie des compléments alimentaires, de rester proche d'un rythme circadien offrant le temps de sommeil et de récupération nécessaire à son organisme, d'abuser modérément des temples de la consommation, des sirènes du marketing, de faire abstraction de tout ce qui parasite inutilement notre action, d'être honnête envers soi-même et les autres.
Faire de l'anti-chasse un fond de commerce ou un programme de conquête politique en montant les uns contre les autres, rappelant la bonne vieille lutte des classes, tient plus d'une stratégie idéologique parmi d'autres vers la conquête d'un pouvoir, que d'une réelle cause à défendre. L'écologie, la biodiversité, nos anciens n'avaient pas besoin d'en faire du temps où la planète tournait encore rondement, du temps où la civilisation des loisirs connaissaient seulement ses premiers frémissements. La conquête des espaces naturels pour faire de la croissance, (plus politiquement correct que de l'argent), pour créer le besoin de nature existant dans l'ADN des hommes urbanisés, a crée l'état problème, pas le chasseur accusé de tuer la biodiversité. La course à la productivité agricole par le machinisme, le remembrement des terres et les artifices chimiques a fait plus de mal à la biodiversité que le chasseur et sa part de prélèvement.
Si le combat écologique est de butter le chasseur hors de la nature, sous couvert de défendre un droit de la vie animale il est "répréhensible" et inutile, de lui-même il déposera les armes. Si la "relation contemporaine à la mort" éveille trop la sensiblerie, alors que nous sommes tous amenés à tirer la révérence un jour, la chasse n'est pas plus responsable du mal être que la peur des pandémies ou des accidents de la route, la chasse reste dans l'ordre naturel des choses, comme tuer le moustique lorsqu'il vous pique. L'angélisme, teinté d'idéologies fumeuses n'aide pas au besoin de plus d'écologie de la planète et de ses hommes, sous peine de disparaître à son tour. L'enjeu n'est pas de savoir si on peut se passer de la chasse ou non, si on peut la remplacer par des pilules contraceptives, des super-prédateurs, par des agents sous contrats pour garantir les équilibres entre espèces et enjeux économiques, par des parcs, des réserves à l'africaine pour créer de faux Eden dédiés au tourisme de masse, il est plus simple, arrêter de se prendre la tête, de se mêler de tout, accepter l'extrême complexité de la réalité, cesser de se triturer sur le lion qui mange la belle gazelle, soit tout simplement se souvenir que la vie animale reste sauvage, avec ou sans le chasseur.
"Le blaireau, petit ours inoffensif de nos campagnes"
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