Prise dans la version "brute", la provocation lancée par le député UMP Antoine Herth, lors du débat parlementaire sur les nouvelles régions, avec son acronyme "Achlor" pour désigner notre nouvelle entité régionale Alsace-Lorraine-Champagne-Ardenne, a de quoi passer pour irrévérencieuse ou vulgaire. En tout cas, cette version acronymique du "trou du cul" est nettement moins poétique que celle de Jules Ferry, après l'annexion de l'Alsace-Lorraine par l'Allemagne en 1871, parlant mélancoliquement de "ligne bleue des Vosges", à propos de la nouvelle frontière avec l'empire allemand et jetant l'Alsace-Lorraine du côté germain.
Maintenant, ne nous cachons pas, la formation de cette méga-région sans véritables liens historiques, géographiques et culturels comme avec la Lorraine ou les Vosges, avec comme seul dénominateur commun le vignoble pour l'Alsace et la Champagne, les sapins et Sedan pour les Ardennes, passe mal auprès d'un bon nombre d'"Alsaciens de souche".
Si vous discutez avec les Anciens, soit ceux attachés à la terre alsacienne et encore marqués par son histoire si bien décrite dans les "Deux Mathildes", beaucoup ne pardonnent pas à la France d'avoir "abandonné" la région avec la défaite humiliante de Sedan en septembre 1870 et la percée allemande sur la même ville, le 10 mai 1940.
Reste aussi encore profondément ancré dans les gènes locales, les insultes encaissées à travers les âges du fait de la double appartenance de l'Alsacien, alors surnommé "Spountz" ou "Boche" et qui en retour a valu aux "Français de l'intérieur" d'être taxés de "Hasebeck", soit de lapins fuyant en référence à la débâcle de Sedan précitée et ainsi livré l'Alsace à l'Allemagne nazie.
D'une certaine manière, le débat sur les régions a réveillé toutes ces querelles du passé et collé une indigestion aux populations alsaciennes. En tout cas, Paris a très certainement sous-estimé le sentiment de l'Alsacien d'avoir été "politiquement" mis devant le fait accompli et donc pris pour des "trous du cul".
La chance du politique, c'est que l'Alsacien "gueule", mais finit par accepter. Il ne tient de ce côté, ni du Corse, ni du Breton. Paris n'a donc pas grand chose à craindre, même si une cassure se dessine comme le montre cette caricature matérialisant la nouvelle frontière. Parions, en tout cas, qu'une consultation publique, comme pour la chasse, déchaînerait autrement les passions !
«Comment appeler cette région, on entend toutes sortes d'acronymes… Chamallow, Alca. Dans le texte, ça serait actuellement, Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine, ce qui donnerait quelque chose comme ‘"achlor".
Antoine Herth