Semaine dernière, j'ai eu le privilège d'honorer les quarante ans de prêtre ouvrier d'un ami et de croiser à cette occasion un militant de la CGT depuis 1945. Sa particularité, hormis ses 95 ans, avoir gardé toutes ses pancartes et banderoles confectionnées pour des "manifs" depuis son engagement militant, de quoi remplir une pièce complète de son appartement, au grand désarroi de son épouse... Avec ma première participation à une "manif" de ma vie, hier contre le GCO, plus chiquement nommé A355, je suis vraiment un "petit joueur", plutôt partisan jusque là que ce n'est pas à la rue de faire la décision, mais aux urnes, respect de la démocratie oblige.
Mais là, avec le feuilleton du Grand Contournement Ouest de Strasbourg, j'avoue que plus je regarde de près ce qui s'est dit depuis plus de 30 ans, s'est fait et se fait et plus je désespère de l'être humain et plus particulièrement de l'homme décideur qu'est ce spécimen de plus en plus détestable, l'"homme politique". Comment peut-on, comme l'a fait Mr le Maire de Strasbourg, un jour clamer haut et fort que le projet est "archaïque et incohérent", qu'"il est une mauvaise réponse à un vrai problème", qu'"on est à l’envers du développement durable et qu'il n’est pas raisonnable de répondre aux enjeux d’aujourd’hui avec des réponses d’il y a 25 ans" et le lendemain devenir un ardent défenseur du projet de Vinci et des lobbies des transports routiers.
D'un autre côté, comment peut-on, avoir une once de confiance dans les hommes d'Etat, en leurs décisions, leurs signatures, lorsque leurs actes sont en complète contradiction avec leurs paroles ? cf discours du président de la république en 2007 au Grenelle de l’environnement, « il faut avoir le courage de reconnaître que nous ne pouvons plus définir des politiques en ignorant le défi climatique, en ignorant que nous détruisons les conditions de notre survie. Premier principe : tous les grands projets publics, toutes les décisions publiques seront désormais arbitrées en intégrant leur coût pour le climat, leur « coût en carbone ». Toutes les décisions publiques seront arbitrées en intégrant leur coût pour la biodiversité. Très clairement, un projet dont le coût environnemental est trop lourd sera refusé. Deuxième principe, nous allons renverser la charge de la preuve. Ce ne sera plus aux solutions écologiques de prouver leur intérêt. Ce sera aux projets non écologiques de prouver qu’il n’était pas possible de faire autrement. Les décisions dites non écologiques devront être motivées et justifiées comme ultime et dernier recours. C’est une révolution dans la méthode de gouvernance de notre pays totale et nous allons appliquer immédiatement ce principe à la politique des transports. Le Grenelle propose une rupture et bien, je propose de la faire mienne. La priorité ne sera plus au rattrapage routier mais au rattrapage des autres modes de transports.
Et à ce petit jeu de "je me fous de ta gueule", François est tout aussi bon dans l'exercice de son pouvoir. Ne vient-il pas cet été d'appeler de ses vœux (Grenelle où es-tu ?), un deuxième plan de relance autoroutier sur proposition de projets par les concessionnaires... autant dire que les Grands du BTP ont les choses bien en main sur fond de promesse de création de 10.000 emplois, de financement sans fonds publics... alors qu'il n'y a pas longtemps, ils étaient dans le collimateur de Ségolène, la chef de l'environnement, sur fond d'augmentation des tarifs des péages autoroutiers. Quel beau retournement de situation, n'est-il pas ?
Inutile de dire que les doubles "winner" seront Vinci, Eiffage, Sanef et les perdants, nous avec des tarifs aux barrières en "hausses autorisées", alors qu'on allait voir ce qu'on allait voir... et toujours plus de particules fines, de destruction de terres agricoles, de forêts, de biotopes, de santé.
Je ne sais plus qui a dit un jour "quand est-ce qu'on reconnaît qu'un homme politique ment ?" "Lorsqu'il ouvre la bouche". C'est ben vrai !
Hélas tout cela ne fera pas l'affaire des habitants des 22 communes concernées , des agriculteurs qui vont perdre leur outil de travail par la Grosse Couillonnade Organisée. Aujourd'hui, une grande partie de la population alsacienne se fiche de ce qui va lui arriver, trop nombreux sont les usagers des bouchons de Strasbourg à croire qu'ils vont pouvoir rouler en semaine aux heures de pointe comme un mercredi ou pendant les congés scolaires, alors que l'enquête d'utilité publique dit elle-même que le trafic ne sera pas plus fluide avec le GCO. Lorsqu'ils verront le viaduc de 16 mètres à la sortie de Vendenheim, (la hauteur d'un immeuble de dix étages...), le Kochersberg défiguré, lorsqu'il faudra mettre la main au porte monnaie soit pour avoir le droit d'utiliser la nouvelle autoroute ou financer le "boulevard urbain" à coups d'impôts locaux, lorsqu'ils comprendront que c'était réellement une couillonnade, parce que le nouveau tracé apportera toujours plus de véhicules, de constructions et de zones, il sera trop tard.
Mais, même si le rapport de force nous est défavorable, il n'en faut pas moins continuer la bataille. Demandons à nos futurs candidats aux présidentielles leur position ferme et sans ambiguïté sur le GCO et tenons en compte dans l'isoloir, répondons aux appels à manifester, même si la météo ne sera pas toujours aussi favorable que samedi, marquons notre désaccord par l'affichage de la banderole "Tous unis contre le GCO" , signons la pétition http://goo.gl/xxdQ14
Parlez-en autour de vous, documentez-vous, dites-vous que nous sommes redevables de ce que nous laisserons à nos enfants et petits-enfants. Ils le valent bien, pas nos politiques "professionnels" et carriéristes.