
Le forum Grand gibier http://www.grand-gibier.eu/forum/viewtopic.php?f=21&t=1415 connaît depuis fin décembre un débat animé autour de la proposition faite par le Fonds d'indemnisation des Dégâts de Sangliers du Haut-Rhin d'instaurer un bracelet sanglier à un tarif "pas piqué des hannetons".
Sur un plan tarifaire, les prix avancés de 55 et105€ rappellent le temps de la peste porcine en zone nord du Bas-Rhin où les services vétérinaires pour inciter au tir indemnisaient les chasseurs à hauteur de 60 et 100€. Un certain nombre de sociétés de chasse ne se sont pas privés de faire de belles affaires à l'époque, en jetant à la benne "jackpot" tout ce qui était "invendable", trop fatiguant à vendre ou lucratif selon le poids de la venaison, en l’occurrence les "pin's". Un vrai scandale, au demeurant bien couvert... sans parler des sangliers qui voyageaient dans les coffres du sud du département vers le nord. Avec le bracelet sanglier éventuel, la chanson n'est plus la même, l'argent ne sortira plus des caisses de l'Etat, mais des poches du chasseur. Ah j'imagine déjà les ambiances des battues 2018, lorsque certains groupes rendront aux honneurs la brisée d'une main et de l'autre la facture selon le nombre de sangliers tirés par chacun. Doublés, triplés se feront aussi plus rares tout comme le nombre d'invités au fur et à mesure de la saison. Côté positif, les gros sangliers seront mieux protégés et l'attention sera davantage porté sur les petits poids, pardi 50€ de différence, ca paye le chapeau !
J'ose espérer que le FIDS 68 a juste voulu jeter un froid, faire passer un message ou couper "démocratiquement" l'herbe sous les pieds aux adeptes d'un bracelet. Amis haut-rhinois, n'ayez crainte, avant de proposer une résolution, le comité simule les chances de la voir passer ou recaler, en fonction du poids électoral des territoires. Les gros pourvoyeurs de vote sont les grands territoires forestiers et leur mobilisation sera en conséquence, la chasse aux "pouvoirs" va s'organiser... Il faudrait déjà une mobilisation absolue organisée, structurée, rapide de tous ceux qui aujourd'hui payent injustement la mutualisation des dégâts. Le bracelet est une fausse bonne idée s'il ne fait partie d'une politique globale de responsabilisation. Cette possible recette a été voulue par le législateur, cf le Pdt Pierre Lang de la FDC 57, pour permettre aux FIDS de frapper les "gros risques", soit les "chasses défaillantes, négligentes ou désinvoltes" . Un bracelet sanglier ne peut avoir de sens que comme complément de recette et s'il est mis en place exclusivement pour les battues à un prix "sympathique". http://www.veillecynegetique67.com/2013/12/un-bracelet-sanglier-la-fin-d-un-tabou.html
Etablir un bracelet généralisé sur toute la saison restera contre-productif, car il n'est pas imaginable que celui qui fait tout pour enrayer les dégâts dans les cultures payent encore pour le sanglier tiré de nuit à l'affût. De même, il est impensable pour le chasseur en forêt qui "fait le travail", qui fait de l'affût pour réguler intelligemment ses densités qu'il soit lui aussi tenu de payer un bracelet, même à prix minime. Et je n'ouvre même pas le dossier des tricheries en chasse individuelle !
http://www.veillecynegetique67.com/l-heure-de-v%C3%A9rit%C3%A9
Maintenant si l'objectif est de supprimer la sectorisation et de la remplacer par le seul prix du bracelet, non seulement on n'est plus dans l'esprit de la loi, en l'occurrence de l'article L429-31 du code de l'environnement, mais on est bien incapable de fixer un prix à l'avance correspondant au déficit à couvrir. Dans ce cas, il n'y aura plus besoin non plus des FIDS, on applique le système qui vaut dans les autres départements, via les Fédérations de chasseurs.
Au final, que montrent tous ces débats dans et autour des FIDS ? Que les membres de l'ancien Syndicat des Chasseurs en forêt n'ont toujours pas trouvé la martingale magique pour disposer de beaucoup de sangliers pour les battues sans assumer trop le prix des dégâts. Que comme dans notre pays en politique, les débats finissent par monter les uns contre les autres, que le sanglier reste un gibier ressource pour beaucoup de chasses, que la mutualisation des sectorisations a atteint ses limites.
Le jour où Fédérations et Fonds définiront sur la base des dégâts historiques et le principe du 360, les secteurs comme l'exige le Plan National de Maîtrise du Sanglier et les soumettront sous le nez des chasseurs qui sauront alors évaluer le degré de risque financier qu'ils veulent assumer avant le début de la saison, soit maintenant, un début de responsabilisation sera fait. Autant je ne crois pas en la capacité de solidarité de toute une communauté, autant je suis convaincu que sur un secteur déterminé, plusieurs groupes de chasse sont capables de définir ensemble en dehors de toute instance une politique commune de gestion des sangliers, des dégâts et du porte monnaie.
Le hic c'est au niveau des communes, donc des propriétaires qu'il faut le chercher. Faire une guerre aux sangliers et une cartographie fine des secteurs à dégâts, c'est rendre publique les chasses à emmerdement et qui à terme vaudront zéro. Qui voudra encore par exemple des 50 lots de chasse dits "sensibles" de cette année et de tous les lots de plaine qui sans sangliers seront dépourvus d'intérêt ?
Les FIDS ont été instaurés en 2005, nous sommes en 2017 et rien n'a changé... toujours autant de dégâts, autant de sangliers. Les deux raisons :
- le projet de loi a été fait par les détenteurs du sanglier
- contrairement à l'objectif annoncé par le rapporteur de la loi, il ne s'agissait pas de"donner aux fonds tous les outils pour non seulement trouver les ressources pour indemniser les dégâts, mais aussi à travers une politique adaptée, dissuader les adjudicataires des territoires qui ont une population de sangliers anormalement élevée", mais de payer moins de surcotisation en forêt pour autant de sangliers.
Toutes les avancées vers plus de justice se sont dès lors faites à l'arrache, par procès interposés, par pression de l'Administration, toujours calculettes à l'appui. Si dès le départ les choses avaient été faites sans arrière pensée, aujourd'hui nous n'en serions pas là : une perte de crédibilité vers l'extérieur sur notre capacité à gérer le grand gibier en général, la perte future des rênes rédactionnelles du Schéma Cynégétique.