« Je suis là, avec toi, murmure le souffle du chien. Tu n’es pas seul dans la vie et je ne le suis pas non plus. Pas une bête féroce, pas un ennemi ne peut s’introduire chez toi à ton insu. Je suis tes yeux et tes oreilles. Dors en paix, il ne t’arrivera rien, car je suis là pour te prévenir et te défendre en cas de besoin. Demain, nous irons à la chasse, tous les deux. Demain, nous nous occuperons de ton bétail. Demain, il fera beau nous nous reposerons au soleil, ensemble nous irons à la découverte du monde. Nous rirons tous les deux, nous jouerons, même s’il y a longtemps que nous ne sommes plus des enfants, toi et moi. Si la chance n’est pas avec toi, et si tu as de la peine et du chagrin, je te consolerai. Tu n’es pas seul, et tu ne le seras jamais, je te le promets. Moi, ton chien, je m’engage à tenir ma promesse, à la respecter comme je respire, à te la rappeler nuit après nuit, dans un murmure, un souffle.
Tel est ce que me disent mes chiens à bas bruit, la nuit, par le souffle de leur respiration. Et comme mon lointain ancêtre des cavernes, je comprends ce langage et il me réconforte. Au fond de mon cœur, je sais que si leurs capacités d’expression étaient limitées au point de leur interdire de transmettre quoi que ce soit d’autre, ce seul message serait assez pour que nous nous comprenions ».
Cette nuit, je n'entendrai plus ce souffle de mon dernier chien, comme l'a si bien décrit Stanley Coren dans son livre "Comment parler chien". "Notre contrat indissociable", s'est arrêté ce midi après seize années de complicité. Désormais, Ma vie de chiens va connaître un grand passage à vide; on a beau se préparer à la séparation, lorsque le moment arrive, le coup porte d'autant plus qu'il n'y en plus d'autre derrière pour assurer la continuité d'un mode de vie.