
Le 30 mai dernier, lors d'une opération de lutte contre les dégâts de sangliers près de Rennes, un chasseur a malencontreusement tué un camarade de chasse également présent sur les lieux. Il s'agissait d'une opération de tir de nuit, lancée à la demande d'un agriculteur et validée par un arrêté du Préfet d'Ille-et-vilaine.
J'ai attendu d'avoir plus d'informations ouvertes sur l'accident pour mieux comprendre le drame qui compte tenu de l'heure, autour de 23h, ressemblait davantage à une action de braconnage qu'à un acte de chasse, étant donné qu'en dehors de l'Alsace/Moselle, le tir de nuit encadré des suidés ne fait pas partie des modes d'action pour prévenir les dégâts de sangliers.
Autant dire que médias et opposants à la chasse pourtant toujours prompts à exploiter le sujet de l'accident de chasse ne se sont guère emparés du sujet, on navigue plutôt dans le profil bas, par manque sans doute de compétence pour parler du sujet, d'un côté et d'embarras de l'autre côté de l'Administration qui a validé l'opération voire, la FDC 35 et sans doute aussi le monde agricole.
Premier constat, par rapport à certains titres parus dans la presse, le tir de nuit ne représente pas une action de régulation des sangliers, mais est un outil de lutte contre la prévention des dégâts. C'est encore moins "une partie de chasse", comme l'ont titré de nombreux médias, mais un mode de chasse nouveau dicté par l'impact de la prolifération des sangliers et la montée des dégâts, introduit en Alsace:Moselle. Et qui dit mode de chasse, dit cadre légal, encadrement, compétence, équipements.
A ce jour, de tout ce que les médias laissent transparaître trois à quatre chasseurs étaient positionnés dans la zone du champ. étaient-ils sur miradors, comme le veut la réglementation chez nous à 2M de hauteur, sans doute pas ? La chasse-affût avec miradors étant peu répandue ailleurs que chez nous.
Etaient-ils expérimentés ? Sans doute pas, se poster à plusieurs autour d'un champ, vraisemblablement sur une chaise, en espérant que les sangliers ne sauront les repérer tient de l'erreur, pour ne pas dire plus, face à l'odorat et l’ouïe du sanglier forts développés, comme tout chasseur le sait et surtout avant de s'aventurer à découvert.
Etaient-ils équipés pour le tir de nuit avec une caméra thermique pour repérer la sortie et la présence de sangliers ? Sans doute pas. Leurs armes étaient-elles équipées d'une optique adaptée à l'opération, non, si tel avait été le cas, le tireur n'aurait pu confondre son camarade avec un sanglier.
Au final, ce drame qui met deux familles en souffrance pour avoir voulu rendre service tient de la bavure, soit une "erreur grave associée à une action involontaire avec des erreurs multiples aux conséquences mortelles".
Au final, ce qu'on peut constater, c'est le danger de la demie-mesure. Ajouter le tir de nuit à l'arsenal préventif des dégâts, sous forme exceptionnelle, c'est pouvoir dire, notamment au monde agricole, vous voyez, nous agissons. Mais le tir de nuit ne s'improvise pas, c'est une affaire de spécialistes, pas par hasard que la mission relevait prioritairement des prérogatives du Préfet et de ses lieutenants de louveterie. L'Alsace:Moselle du fait du statut d'ESOD du sanglier et dans l'objectif de réduire la facture des dégâts, chasse de nuit depuis plusieurs années sur les zones cultivées tout au long de la saison de chasse et au-delà. Maintenant, combien sommes-nous à le pratiquer véritablement, régulièrement selon les expositions au risque de dégâts ? Dans notre secteur, il est rare d'entendre des tirs de nuit au-delà de l'heure légale...
On ne sort de nuit comme on fait un affût de jour. Par rapport aux autres régions françaises, nos trois départements de la loi locale ont la culture de l'affût, qui a bien aidé à la transition vers le tir de nuit, lorsqu'en 2013 le tir après l'heure légale avec source lumineuse a été autorisé puis en 2020 avec intensificateur de lumière et maintenant avec lunette thermique. En France de l'intérieur, l'aventure ne fait que commencer. Si demain, elle doit suivre, il faudra cocher bien des cases, avant de se lancer individuellement, voire collectivement en sécurité.
https://www.veillecynegetique67.com/2019/04/conseils-et-cout-autour-du-tir-de-nuit-du-sanglier.html
https://www.veillecynegetique67.com/2020/08/l-equipement-du-tireur-de-nuit-de-sangliers-suite.html
Il se lance aujourd'hui un business autour de la traque-affût pour arrondir les fins de mois, il y a incontestablement de quoi faire aussi pour la chasse de nuit, si véritablement elle doit être le fer de lance pour réduire les factures des dégâts de sangliers ! Si c'est juste pour donner de l'opportunité de sortir au gré de l'humeur, calmer les esprits, donner plus de temps de chasse, un marché pour les équipementiers et ses influenceurs, l'approche n'est pas la même, encore moins le résultat. Il n'en reste pas moins que bien faite, elle ne peut absolument pas engendrer d'accidents envers autrui, par contre elle est un outil efficace de dissuasion, si pratiquée intensivement et quand il le faut.