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Au regard de l'engouement des lecteurs pour mon article sur la responsabilité des dégâts par un membre du FIDS 67 sans capacité d'action sur son territoire, ni capacité d'influer sur la gestion et les densités, il paraît intéressant de creuser plus en avant la question à travers trois interrogations :

Pourquoi les FIDS ?

Il convient de ne jamais oublier que les trois FIDS sont en premier une simple émanation du Syndicat des Chasseurs en forêt, des personnes morales voulues, créées par les tenants du sanglier avec des statuts contestés, vacillants et finalement sauvés d'autorité,  validés par la loi  à un moment où la surtaxe pesait lourdement sur les budgets des chasses de forêt et plus particulièrement sur ceux des grandes chasses, soit celles avec beaucoup de ha boisés.

C'est un système mis en place en Alsace/Moselle de responsabilité collective ou sociale des dégâts, en aucun cas ce n'est un organe de gestion des populations. Cette mission reste de la compétence des Fédérations ce qui n'est pas sans poser des problèmes, cf les chamailleries récentes autour des négociations sur le nouveau Schéma Cynégétique http://www.veillecynegetique67.com/2018/11/diviser-pour-regner-nous-voila-bien.html.

C'est une association en réformes constantes au fil des aléas, avec en dernier un passage, plus ou moins contraint, à une certaine forme de responsabilisation des "mauvais gestionnaires", par une sectorisation devenue plus affinée autour des zones de dégâts.

Cela reste un système de financement collectif, toutes les chasses payent une contribution de base, toutes les chasses qu'elles aient du sanglier ou non payent un complément en cas d'insuffisance des recettes de base (cotisation + timbre), tous les chasseurs impliqués dans le tir du sanglier devant aussi s'acquitter d'un timbre sanglier. Sur ce point, il est bon de rappeler que le FIDS 67 a imposé le timbre comme une contribution de base, alors qu'il figure parmi les options ouvertes par le législateur dites "contributions complémentaires" à voter normalement après déficit constaté et parmi lesquelles figurent aussi l'option "bracelet",écarté depuis toujours.

En résumé les FIDS,

  • obligent les chasseurs à mutualiser les risques
  • font passer les chasseurs d'une responsabilité individuelle vers une responsabilité collective des dégâts
  • mais l'évolution vers un ciblage des "mauvais gestionnaires" par une sectorisation affinée revient à rendre certains chasseurs responsables individuellement, pour faute, celle d'avoir laissé monter les dégâts par "négligence, défaillance ou désinvolture".

Les FIDS ont-ils favorisé les dégâts ?

L'historique sur la montée et les raisons à partir des années 70 des populations de sangliers n'est plus à faire. Tout le monde connaît les causes, déclin du petit gibier, développement du sanglier "ressource" et de la chasse "marchande" emprise du maïs, choix d'aller d'une gestion qualitative vers une gestion quantitative des sangliers, choix de privilégier la battue, détournement de l'agrainage, abus sur les quantités, laisser-faire des chasses marchandes en nom propre, de la sous-location, soit toutes "les techniques" qui permettent d'entrer du budget.

Par contre, peu de littérature sur l'effet pervers de la mutualisation des dégâts et pour cause. Dès que les doigts ont été mis dans l'engrenage du sanglier "ressource"  axé sur le "besoin d'avoir" beaucoup de suidés, la préoccupation majeure des instances n'a bien sûr pas été de mettre en place des contre mesures pour réduire ou gérer autrement les sangliers. C'est sur le financement des dégâts et leur prévention par la montée en puissance des clôtures, la garantie à donner aux agriculteurs d'être indemnisés que s'est portée toute l'attention des chasseurs en forêt. Politique facile à mener lorsqu'on est juge et partie, comme cela a été le cas pour le Syndicat des Chasseurs en forêt et lorsqu'en même temps vous "maîtrisez" les arcanes de la législation avec les parlementaires du Groupe chasse, rien de plus facile que de faire passer  un argumentaire pour partager la facture non plus sur quelques-uns,  la forêt, mais sur tout le monde, forêt et plaine, adjudicataires et porteurs de permis. Pour ces derniers, là aussi il est bon de rappeler que bien que participants au financement de l'association, ils n'ont aucun droit de vote, ni-même de participation aux AG, ce qui est assez inédit en droit associatif et donne un caractère "fermé", contrôlé de l'objectif de l'association...

"Les sangliers sont mal gérés et nous sommes tous responsables", disait en 2002, le Président du Syndicat des chasseurs en forêt. Pourtant, les efforts des administrateurs ont continué à se porter non vers une diminution des cheptels, mais vers une solution de type martingale qui jonglait au plus favorable avec le maintien du capital sanglier et une diminution de la quote part à payer de la forêt. Depuis l'instauration des Fonds en 2005, les populations de sangliers n'ont donc jamais baissé, (y compris pendant la peste porcine dans le nord du 67) avec des tableaux conséquents 16.600 en 2017/18, un niveau de prélèvement élevé en battues et des agriculteurs de  plus en plus virulents.

Sans aucun doute, la mutualisation a contribué à maintenir et accroître les comportements "opportunistes" de la forêt avec plus de sangliers et moins de contributions à payer, sur la base que "la prise de risque" d'avoir plus de sangliers et plus de dégâts était largement compensée par la dilution de la facture sur tout le monde. C'est bien l'instauration des Fonds qui a donc provoqué la montée des chasses dites "défaillantes, négligentes, désinvoltes" soit avec des pratiques de tirs conservatrices et des nourrissages excessifs. 

Avec l'élargissement depuis peu et "malgré lui" de la sectorisation par le FIDS 67, les mouches ont cependant été forcées de "changer d'âne". La déresponsabilisation n'est plus en odeur de sainteté, d'un côté parce que l'injustice commençait à ne plus être défendable en interne et de l'autre parce que le politique (Plan Borloo, circulaire NKM) et l'agriculture ne voulaient plus de surpopulations de sangliers et de montée de dégâts. Ce changement est non seulement salutaire pour, par le portefeuille, ramener de la raison dans la maison sanglier, mais remet au goût du jour un principe mis à la création des FIDS sous le tapis, celui du "pollueur payeur" pour les raisons évoquées.

Existe-t-il d'autres responsables que les chasseurs dans l'émergence des dégâts ?

Reste un dernier point noir, celui soulevé l'an dernier par notre groupe de chasse et objet de mon post du 25/12 http://www.veillecynegetique67.com/2018/12/fdc-67-fids-67-ddt-et-responsabilite-du-chasseur-de-plaine-sans-bois-faites-votre-opinion.html . Il concerne les territoires d'un seul tenant sans bois ou en-dessous du minimum de ha boisés pour disposer d'un point d'agrainage. La seule possibilité donnée à ces chasses est le tir de nuit avec ou sans lampe et limitée dans le temps, selon les années. Elles sont soumises à la volonté du Préfet, sans tenir compte des particularités des territoires, des conditions climatiques hivernales, des dispositions particulières prises par l'ONF sur l'agrainage, du non respect des cultures par les sangliers pendant la fermeture générale de la chasse ! Ce type de chasse rend totalement spectateur et sans réactivité immédiate possible le chasseur de plaine en certaines périodes de l'année, notamment si son territoire est en sortie directe de forêt, avec beaucoup de prés. Il expose ce type de chasse à la sectorisation alors qu'elle est totalement dépendante de la gestion des densités par la forêt, des mesures prises en matière d'agrainage dissuasif, des actes administratifs.

Les observations de l'an dernier entre janvier et fin février, avec d'un côté de l'agrainage dissuasif "illégal"  en forêt et sanctionné début de l'année et de l'autre pas de linéaire, l'arrêt du linéaire cet année en novembre des deux côtés, l'observation des sorties des sangliers, y compris dès deux jours après des battues, montrent que sans contestation possible seul l'agrainage permet de tenir les sangliers en forêt, seul le tir avec résultat stoppe les sorties nocturnes dans "les bars à sangliers". Connaissez-vous beaucoup de chasseurs qui, pour freiner la casse (et non pour faire de la viande) sont encore sortis ces quinze dernières nuits pratiquement sans interruption, à l'exception des deux soirées de grosses pluies et de vents et du soir de la veillée ? Moi oui.

Les observations filmées de l'an dernier après la fermeture générale, l'inutilité de la dissuasion sonore comparées aux résultats obtenus après un tir de nuit ont également démontré que la seule arme dissuasive immédiate du chasseur sans bois est le tir nocturne. 

La conjugaison, fin de l'agrainage dissuasif hivernal et absence de tir de nuit quelles que soient les densités sont la porte ouverte sans contestation possible aux dégâts hivernaux. Par le passé, janvier-février étaient des mois à fortes gelées rendant les sorties de sangliers "impraticables". Le réchauffement climatique apparemment nous procure de plus en plus de nuits hors gel, il convient d'adapter les mesures : agrainage linéaire encadré en forêt sur les territoires proches des sorties, autorisations de tir de nuit délivrées à la demande auprès des lieutenants de louveterie après constats sur le terrain. A défaut ces dégâts ne sont du fait des chasses concernées, les dommages causés du fait de leur responsabilité et les montants ne sont à payer par les chasseurs.

En résumé :

  • les Fonds par la mutualisation du financement des dégâts ont provoqué un effet d'aubaine avec une montée de comportements "opportunistes", les coûts des dégâts liés à la surpopulation sur certains territoires étant gérés-payés par l'ensemble des chasseurs
  • la déresponsabilisation a favorisé une conservation des populations pour les battues
  • le recours dissuasif au tir de nuit n'est de ce fait pas suffisamment et de façon conséquente utilisé sur tous les territoires exposés au risque de dégâts. Il est par contre de plus en plus pris en compte par les chasses exposées aux sorties nocturnes sans possibilités d'agrainage, par celles entrées volontairement dans la responsabilisation pour éviter la sectorisation ou celles obligées à un résultat par l'Administration.
  • un retour à la responsabilité individuelle est en passe de se développer par une sectorisation élargie, sur la base d'une mauvaise gestion des risques 
  • l'incidence sur le portefeuille des adjudicataires et leurs "associés" ... et la gestion de la prise de risque de surpopulation sont étroitement liés 
  • le nouvel encadrement de l'agrainage tel que prévu devient un risque d'accroissement des dégâts, même avec une diminution des populations (un seul sanglier peut détruire un champs), sans adaptation des mesures de luttes et possibilités de réactivités "individualisées".
  • toutes les instances concernées par les sangliers, les dégâts et la réglementation ne peuvent "botter en touche" et renvoyer l'état problème sur le chasseur sous prétexte que "c'est comme cela" ou que cela concerne une minorité.

Il en va de l'avenir des chasses et du chasseur

  • Sauf erreur, 10 ou 11 lots domaniaux sur 20 de la forêt de Haguenau vont revenir sur le marché, par désaccord sur l'agrainage ou par augmentation, du loyer au regard des dégâts forestiers ou pour les deux raisons. Ailleurs, les désistements sont aussi significatifs.
  • une forme de "professionnalisation" de l'exercice de la chasse, sous ordre est plus que jamais en marche. C'est ce que fait déjà l'ONF dès qu'elle ne trouve preneur d'un lot.
  • la mutualisation ne sera rapidement plus supportable avec une baisse des contributions de base, la baisse de collecte des timbres sangliers en liens avec la notion d'invité et de diminution des opportunités de tir, de la pyramide des âges, des charges constantes à couvrir des Fonds,  des interrogations sur l'avenir des clôtures dissuasives et des sorties invasives non contrôlables des sangliers en hiver. N'oublions pas que nous sortons de deux années "miraculeuses" en termes de prix des denrées agricoles et de rapidité de rentrée des récoltes. Les dégâts de prés estimés ce printemps vont déjà servir de sonnette d'alarme.

le Bundschuh

 

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