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L'heure de vérité

Mardi le 16 juillet dans l'après-midi, l'ensemble des "acteurs" du dossier sanglier et des dégâts vont se rencontrer pour trouver des réponses ou des solutions face à la crise provoquée par les chasseurs "apprentis sorciers" et non par sus scrofa.

Nul doute que dans tous les camps les dossiers seront prêts et les arguments aiguisés. D'ores et déjà la sentence sera lourde pour le monde animal qui lui n'aura aucun représentant autour de la table des négociations. Certes les représentants des chasseurs chercheront à sauver les meubles, mais leur marge de discussion sera maigre, en face il y aura les chiffres en hectares et en euros et certainement une Administration décidée.

Tirez-tirez ne sera plus une supplique, mais un ordre ferme avec contrôle et résultats. Frankonia et tous les armuriers peuvent déjà se réjouir le chiffre d'affaires en 9,3- 8,57 et autres calibres va grimper dans les prochains temps. Peut être aurons-nous même une aide de la Fédération aux frais de "munitions" ou une boîte gratuite pour dix sangliers tirés pour ne pas avoir l'excuse du non tir invoquée dans le dossier corvidés "les cartouches coûtent chères" ?...

On pourrait aussi imaginer un jeu de grattage avec un ticket surprise pour chaque suidé tiré. Si tu as de la chance, tu peux gagner un safari ou un resto chez un étoilé d'Alsace, une nuit d'affût par clair de lune ou un séjour à la ferme ! Si tu as la poisse tu pourras toujours "retirer"...

Si "la coupe est pleine", comme l'a fait savoir le monde agricole à juste titre, il faudra néanmoins savoir garder raison. Sur ce blog, j'ai suffisamment décrit la scène et les coulisses du Grand Barnum ou cirque qu'est devenu le dossier sanglier au fil du temps. Les causes principales de "la bulle du sanglier" se trouve d'abord dans le côté sombre de l'espèce humaine, elle porte comme nom, l'argent, la vanité, l'orgueil, la jalousie, la tromperie, la tricherie et autres qualités humaines qui pourrissent la vie en société. Qui est-ce qui a la plus grande et belle chasse de sangliers, qui fait les plus grands tableaux, qui met en scène les plus beaux "after", qui est le meilleur scoreur, qui prend les autres pour des cons ou des clowns ?

La deuxième raison, pour reprendre un terme en vogue actuellement, se retrouve dans la notion de "bande organisée". Tout un système s'est progressivement mis en place avec le recours à des méthodes et des pratiques interdites sur le terrain et un travail d'influence, de lobbying pour faire voter les lois favorables à ceux qui dirigeaient le projet "sanglier ressource".

La troisième cause est à trouver dans l'hypocrisie des discours. Officiellement, le monde agricole répétait l'interjection favorite qui a fait la gloire de Georges Marchais "c'est un scandale" et dans les négociations finales avec les instances de la chasse il pensait "part d'intérêts". C'est que bon nombre d'agriculteurs "commercent" tout de même avec le monde de la chasse. On a beau dénoncer l'agrainage intensif en forêt pour faire du sanglier, certains en profitent tout de même par la vente de leur maïs. Dans tout deal vous avez un vendeur et un acheteur. Il en est de même dans ce dossier.

De la même manière et c'est connue du monde agricole, bon nombre d'hectares ont été transformées en champs de maïs en connaissance de cause de dégâts futurs. La perte de foncier agricole n'est pas de la faute des chasseurs et ne justifie pas forcément la ruée sur des terres inappropriés, jamais cultivés par les anciens, par exemple dans des enclaves forestières ou en zones inondables. La loi a d'ailleurs pris en compte l'abus, mais elle n'est pas appliquée localement "lorsqu'il est constaté que la victime des dégâts a favorisé l’arrivée du gibier sur son fonds".

La quatrième cause est la collusion qui peut exister entre les uns et les autres. Les "échanges de bons sentiments" fonctionnent dans le monde des affaires, ils marchent donc forcément aussi dans celui de la chasse. Au final, peu de sanctions réelles, quelques exemples pour la façade, alors que les contrevenants sont connus de tous.

Comme on le voit, tous les acteurs du dossier ont donc une part de responsabilité et au final, tous les "partenaires" se retrouvent dos à dos ou ont un "mea culpa" à faire.

Revenir sur le passé comme on dit ne change rien. C'est l'avenir qui importe. Alors quelles mesures peuvent être prises ?

  • Incontestablement, il s'agit de travailler en premier sur les densités en forêt. Actuellement, seul l'affût peut y être pratiquée. Si on veut à la fois inciter et favoriser le tir, il convient en premier d'allonger l'heure légale de tir d'une heure. Cette mesure doit obligatoirement être accompagnée de risques de sanctions d'une sévérité absolue pour être dissuasive en cas d'infraction. Je connais trop le mauvais côté de la chasse et de certains chasseurs, je suis actuellement au cœur d'un "fait divers" de ce type sur lequel je reviendrai en temps voulu sur ce blog, pour savoir que l'art de la chasse et l'éthique sont facilement bafoués par l'attrait du tir.
  • En deuxième lieu, il convient de poursuivre l'agrainage dissuasif, mais uniquement sectoriel, soit au regard des zones à risques, soit les zones à cultures. Sont donc à exclure les zones à prés ou pâtures, car on sait que l'attrait pour ces cultures n'est pas lié à l'appétit, mais à un besoin de nourriture protéinée. Si on veut couvrir ces zones le plus souvent montagneuses, il convient de voir le cas échéant à autoriser uniquement un agrainage linéaire avec des pois.
  • Pour ce qui est de l'agrainage sectoriel, un apport journalier jusqu'à la rentrée des maïs doit pouvoir être possible.
  • A partir de la fin des récoltes, soit mi novembre, l'agrainage linéaire est à suspendre complètement sur tout le département pour éviter la concentration et favoriser la dispersion et ainsi favoriser le tir de davantage de sangliers.
  • A minima chaque groupe de chasse avec plus de cinquante hectares de forêt figurant sur la liste des points noirs devra avoir fait deux battues en novembre, avec communication des résultats.
  • A situation exceptionnelle mesures exceptionnelles, donc permettre un retour au tir à chevrotines en battues est à envisager pour assurer de meilleurs résultats. Si l'objectif est de réduire en priorité la classe jeune, la chevrotine le permettra au mieux. A chaque groupe de chasse de savoir ce qu'il veut, chasser comme avant ou obtenir du résultat par le prélèvement total des jeunes.
  • Dans ce sens, il est également à prévoir ou du moins à encourager les battues concertées toujours pour permettre un meilleur taux de réussite car le gibier viendra dans de meilleurs conditions de tir.

C'est seulement après avoir réellement baissé les densités avec un objectif de trois sangliers matures par cents hectares de forêt que pourra être envisagé un deuxième volet d'actions à prendre à la fermeture généralisée de la chasse :

  • autoriser le tir de nuit en forêt par temps de neige ou cinq jours avant et après le clair de lune.
  • maintenir l'heure légale supplémentaire pour le tir à l'affût
  • arrêter l'agrainage à postes fixes et le remplacer par l'agrainage appât avec petites quantités enfouies ou en petits tonneaux au sol
  • poursuivre les battues jusque fin mars dans toute zone avec dégâts de prés ou aux cultures d'hiver ou sur les chasses avec encore de fortes densités de sangliers.
  • pour ce qui est de la dissuasion en zones à dégâts, y compris en massifs montagneux pour les pâtures, autoriser l'aide d'une source lumineuse pour le tir de nuit jusqu'à fin mars de l'année prochaine.
  • à la fin de la campagne, soit fin mars, à la connaissance des résultats enregistrés par un reporting aux autorités (à définir), refaire une table ronde pour définir les mesures à mettre en place pour la nouvelle saison de dégâts.

Pour ce qui est du Fonds d'Indemnisation des Dégâts du 67, il conviendra de sortir du système de la mutualisation des contributions complémentaires mis en place jusqu'ici par :

  • un zonage des zones vitales des sangliers à partir des zones de dégâts pour définir par cercles concentriques les domaines de bauge du plus proche au plus éloigné des cultures. Le sanglier, c'est prouvé est devenu sédentaire par l'agrainage avec des compagnies qui s'empilent les unes sur les autres sur des territoires allant en général de 500 à 3 000 hectares.
  • par l'abandon de l'intégration des territoires non boisés ou avec bois mais sans possibilité d'agrainage, dans le calcul des cotisations complémentaires. Ces territoires n'ont rien à voir avec la gestion des densités que seule la forêt est en mesure de réaliser. Ils sont encore moins responsables des exagérations et abus de droits qui ont ou sont commis en matière d'agrainage ou de chasse commerciale.

L'avantage financier retiré par la forêt, en faisant contribuer l'intégralité des territoires de plaine, a incontestablement favorisé le maintien artificiel d'un surnombre de sangliers "dit ressource" pour les battues, au détriment de l'équité et de la responsabilisation.

Les populations de sangliers seront à nouveau mieux gérées par la forêt à partir du moment où le risque financier pèsera à nouveau entièrement sur eux et notamment les groupes défaillants, désinvoltes ou négligents.

  • par la mise en place dès la mi-octobre d'une bague sanglier à un prix suffisant au regard de la facture des dégâts à venir
  • par la convocation d'une assemblée générale en septembre pour mettre chacun devant ses responsabilités.

Côté monde agricole, la qualité du travail au moment du semis influe grandement sur le taux de dégâts. Tout le monde peut le constater, les grains sont souvent enfouis à faible profondeur et sans tassement par rouleau de la terre. Il suffit au sanglier de jouer à l'aspirateur pour en très peu de temps absorber une grande quantité de lignes de maïs.

Le problème est identique pour les corbeaux qui accèdent facilement au grain avant la levée.

Toute "facilitation" pour aider aux dégâts doit pouvoir être punissable. Il n'est pas normal que les clôtures électriques soit sabotées ou laissées ouvertes après un passage de machines agricoles, que des plaquettes de répulsifs mis en place par le chasseur soient enlevées, que l'implantation d'un mirador ou échelle soit refusée.

Enfin, côté répression-action, il convient que l'Administration intervienne systématiquement en cas de non gestion des populations au regard d'une zone à dégâts par la réalisation de battues administratives, que les services de police aient tous les pouvoirs pour sanctionner fortement les délits de chasse commerciale, les actes de braconnage (chasse d'autres espèces que le sanglier en tir de nuit ou à l'agrainé), l'abus d'agrainage, le recours aux attractifs interdits.

Il y a certainement d'autres possibilités encore pour ramener le calme dans la maison de la chasse et éteindre le feu passionnel qui est allumé, mais à la sortie de la réunion du 16, il importe qu'un dispositif partagé soit décidé autour des fameux "droits et devoirs" de chacun. Si un vœu est à formuler, que les décisions prises sortent à partir de la "vérité des faits" en réelle connaissance de l'ensemble des tenants et aboutissants et non de la représentation individuelle du dossier ou de son degré de connaissance.

Au final, il n'y aura qu'une seule victime, sus scrofa qui pourtant mérite beaucoup mieux que la vindicte populaire, à commencer par le droit de vieillir ce qui ne pourra se faire que lorsque la chasse passera du quantitatif au qualitatif.

Rappel d'un diaporama déjà publié sur la gestion du sanglier

Tag(s) : #Gestion du sanglier et des dégâts, #Vie des instances de la chasse, #Billet d'humeur
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