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Le déclin du petit gibier, après la « corne d'abondance » jusque fin des années 80 du siècle dernier... est parmi d'autres causes, une des raisons qui a amené au concept du sanglier gibier numéro un en Alsace et par la suite « gibier ressource » pour financer la chasse « business ».

Pourquoi pas, je défends suffisamment les principes de liberté pour aller contre des choix de chasse individuels s'appuyant sur la « générosité » reproductrice du sanglier. Mais, car souvent il y a un mais, ce choix demande d' assumer, en contre partie et individuellement, la responsabilité des risques, en l'occurrence celui des dégâts.

Il m'est souvent reproché de « pourfendre les éleveurs de sangliers ». C'est un faux procès. Je n'ai rien contre celui qui choisit de « faire du sanglier » en forêt, tant qu'il en assume la responsabilité financière. Il en est autrement, lorsque ce dernier veut faire payer la collectivité parce que « l'apprenti sorcier » est dépassé par la prolifération recherchée des suidés, et se « faire du gras » sur le dos des territoires non boisés ou n'ayant pas suffisamment de forêt pour faire de l'agrainage (interdit en-dessous de cinquante hectares).

Lorsque les chasseurs « ont racheté » le droit d'affût aux agriculteurs en contre partie de la prise en charge des dégâts, ils se sont engagés à prendre en charge les dégâts.

« Ils », se sont sont ceux qui disposent du sanglier, soit les groupes de chasse en forêt où seule naît, vit et se gère quantitativement et qualitativement le sanglier.

C'était alors la naissance du Syndicat des chasseurs en forêt en Alsace/Moselle dont seuls étaient membres, donc votants, les territoires forestiers. Logique et cohérent en soi, ce système est cependant allé plus loin pour prendre en compte la réalité du terrain.

Il a fait participer l'ensemble des territoires, qu'ils soient de plaine, de montagne ou d'ailleurs, avec ou sans présences de suidés. Ainsi, chaque groupe de chasse versait 10 % au Syndicat du montant de son bail de chasse, à charge des membres uniquement, soit la forêt, d'assumer les déficits éventuels entre les recettes mutualisées, les dépenses de fonctionnement et l'indemnisation des dégâts agricoles. (On parlait alors de « surcotisation » à l'hectare boisée, aujourd'hui, on parle de « contributions complémentaires »).

Ce système original, spécifique aux trois départements et à son régime local a ainsi permis pendant de longues années de fonctionner normalement. La plaine « faisait la chasse » aux sangliers, considérés comme un hôte indésirable pour le petit gibier et la forêt tirait essentiellement du chevreuil et selon les massifs des cervidés et du sanglier, sans atteindre de grands tableaux.

La première expérience positive de concentration de sangliers et je suis bien placé pour en parler, car j'ai grandi sur ce domaine où mon père était régisseur du Comte Jean de Beaumont, a été faite, début des années 60, en forêt rhénane de Rhinau, située en pays de Bade. Ce choix était réfléchi dans la mesure où il n'y avait aucune culture périphérique dangereuse au-delà des anciennes digues du Rhin. L'ensemble des surfaces non boisées attenantes était alors faites de prés et la forêt était tellement dense et favorable aux sangliers que rares étaient les sorties.

Bien que territoire français, il relevait de par sa localisation du droit de chasse allemand, avec ce que cela comportait comme conséquence en cas de dégâts, à la charge unique du locataire...

Lorsque, hélas, la maïsiculture est arrivée dans le Ried alsacien, les agriculteurs de Rhinau ont bien évidemment retournés les prés pour y faire aussi du maïs, ce qui a bien évidemment changé la donne et accru le risque.

Petite parenthèse et hommage à cet endroit au père Giedemann et à son fils Hubertus, pour leur énorme travail de dissuasion la nuit, à ce moment là et à leur travail permanent pour récolter à la main, sac par sac, les épis destinés aux sangliers en forêt, à partir des champs les plus exposés, rachetés aux agriculteurs... Eh oui, point d'agrainoirs automatisés à cette époque, mais l'huile de coude pour aussi occuper plus longtemps les sus scrofa sur place.

Et si déjà, je fais sortir souvenirs et à émotions, c'est bien sûr là que j'ai tiré mon premier sanglier à onze ans, à l'affût, une bête rousse avec une vilaine balle de mâchoire et connu d'innombrables scènes de chasse, comme guide.

Bien sûr ce travail a petit à petit porté ses fruits et les tableaux des deux seules battues organisées vers la mi-janvier, après la fermeture du petit gibier, étaient en constante augmentation, mais cette montée en puissance des densités restait sous contrôle et surtout ne coûtait rien au reste de la collectivité des chasseurs en forêt, puisqu'à charge du seul Comte de Beaumont.

Au niveau des chasseurs bas-rhinois, c'est fin des années 60 que la Commission Grand Gibier a commencé à porter le débat à la Fédération des Chasseurs en demandant à « épargner » davantage les laies de plus de cinquante kilos. Seuls quelques uns de nos anciens administrateurs, dont mon partenaire Freddy, veulent ou peuvent encore se souvenir que le débat a été rude pour imposer au final ce choix, inspiré des chasses d'Arc en Barrois.

Un des avis opposés provenait alors même du directeur du Syndicat qui cumulait cette fonction avec celle de directeur de la Fédération de l'époque et qui mettait en garde les chasseurs en forêt du risque de dérapage financier, compte tenu de l'immense capacité de prolifération des femelles.

Aujourd'hui, l'histoire a rattrapé le présent, la manne financière procurée par le sanglier a continué au fil des ans à l'emporter sur la sagesse, la mutualisation de base a été élargie par l'introduction du timbre sanglier puis par une sectorisation par Groupement de Gestion Cynégétique « bidouillée » et la déresponsabilisation est arrivée à son paroxysme maintenant, en faisant porter le chapeau aux groupes de chasse de petit gibier, devenus otages de la non gestion des sangliers par la forêt.

Mais pouvait-il en être autrement, dès lors que l'intérêt particulier l'emporte sur l'intérêt général ?

Pouvait-il en être autrement, dès lors que les Fonds d'Indemnisation sont les Chasseurs en forêt, soit « juges et parties » ?

Pouvait-il en être autrement quand l'hypocrisie, la langue de bois, les groupes de pression pèsent sur les votes aux Assemblées Générales des instances de la chasse ?

Pouvait-il en être autrement selon que vous soyez « puissant ou miséreux » ?

Bien sûr.

Il suffit d'appliquer les textes, en l'occurrence le Plan National de Maîtrise du Sanglier qui exige, entre autre, non une sectorisation par GGC, mais un zonage des secteurs vitaux des sangliers, la circulaire NKM sur l'agrainage, l'article L.425-5-1 qui pénalise le défaut de gestion cynégétique en cas de dégâts, d'aller au-delà du simple listing des points noirs et du compilage de listes de lots soumis à des battues administratives par le Préfet.

C'est enfin, après une refondation complète du « système FIDS », le retour à une « moralisation », un mot si à la mode actuellement, de la chasse de sanglier.

C'est donc mettre un terme au « sanglier ressource » en faisant tout simplement respecter l'article 14 de notre cahier des charges des chasses communales :

« Il est interdit au locataire de tirer de ses droits sur le lot de chasse des recettes autres que celles procurées par la vente du gibier tué ou repris vivant dans les conditions prévues au cahier des charges type et par les participations financières versées par les associés régulièrement déclarés et inscrits, participation dont le montant ne peut excéder ce qui est nécessaire pour compléter le prix de vente du gibier jusqu'à concurrence de la somme du loyer, des taxes, des indemnités de dégâts de gibier, des salaires des gardes chasse et rabatteurs, de l'agrainage du gibier et des autres frais normaux de gestion et d'exploitation du lot de chasse »...

"La démocratie, ce n'est pas la loi de la majorité, mais la protection de la minorité" Albert Camus

Albert Camus

Tag(s) : #Faune-Nature-Ecologie et Chasse, #Vie des instances de la chasse, #Gestion du sanglier et des dégâts, #De ma vie
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