Depuis 1984, aménager le rythme de vie de l'enfant scolarisé a fait le cauchemar des ministres successifs de l'Education Nationale et de la Jeunesse et des Sports. Des tas de dispositifs ont ainsi été expérimentés ou mis en place, notamment dans les années 90. Cette génération de gamins et de parents se souvient sans doute encore des sigles pour autant de dispositifs, Contrats bleus, C.A.T.E., A.R.V.E.J et autres C.E.L.
Aujourd'hui, la grande réforme tourne autour de la semaine des quatre jours et demi pour, si l'on est politiquement honnête, avant tout libérer le samedi matin dans le cadre du projet de civilisation autour du loisir et de la consommation.
Ce qui est frappant, quelle que soit l'époque ou les hommes en charge de l'éducation de nos futures forces vives, ce sont les discours, les certitudes, les arguments avancés par les parties prenantes, les élus, les enseignants, les parents d'élèves, les syndicats, sans tenir compte du passé. Pourtant, en trente ans d'expérimentation et d'évaluations on devrait maintenant savoir ce qui est favorable ou pas à l'épanouissement de nos chérubins.
Un constat est certain, les nouvelles générations ne sont pas meilleures à la sortie du système scolaire. Certes, le taux de réussite au Bac est élogieux, mais la finalité de l'Education Nationale est-elle de faire des bacheliers ou de faire acquérir des compétences pour affronter la réalité du monde qui est impitoyable ?
Beaucoup de ceux qui ont à faire à des jeunes au moment d'entrer dans la vie active et j'en fais partie, vous diront qu'en terme d'acquisitions de compétence, le doute est permis sur l'efficacité du système scolaire. Avec un Bac en poche, on doit s'attendre à ce que le jeune ait une compétence linguistique écrite et orale avec au minimum la maîtrise d'une langue européenne, qu'il sache parfaitement écrire, lire et comprendre sa langue, qu'il ait un esprit d'analyse et de synthèse, une culture générale pour forger son esprit critique, une aptitude au raisonnement, à la prise de notes, bref les fondamentaux pour asseoir des études supérieures. Pour beaucoup nous en sommes loin, avec des lacunes qui nécessiteraient, si l'on est cohérent, au préalable à une vie post Bac, une mise à niveau en rapport avec les exigences d'une vie professionnelle et d'un métier.
Alors quatre jours et demi ou cinq jours de classe, la question n'est sans doute pas là. La question est plutôt quelle école peut être la plus efficace au regard de la spécificité de son public, l'enfant.
Lorsque les Contrats d"Aménagement du Temps de l'Enfant ont vu le jour, l'idée était de composer la journée de l'enfant autour de ses temps forts pour les matières scolaires et de ses temps faibles pour des activités extra-scolaires, selon les recherches notamment de Hubert Montagner. Des tonnes de dossier, des heures de réunion et de concertation ont alors vu le jour et malgré la réticence du corps enseignant au départ, le principe autour de la chronobiologie de l'enfant a fini par plaire. Le problème essentiel, tout comme aujourd'hui, résidait dans le financement des heures faites par les "intervenants extérieurs" à l'école et la compétence professionnelle de ces derniers.
En tout cas, si le projet était bien ficelé par l'école, tout le monde y trouvait son compte au final jusqu'à ce qu'un autre ministre décide de passer à autre chose, histoire de laisser son empreinte. Aujourd'hui on revient aux quatre jours et demi en continu, du temps des CATE on laissait le mercredi libre et on maintenait le samedi matin. L'avantage c'est que le gamin qui voulait récupérer pouvait le faire et celui qui avait des activités sportives ou culturelles pouvait s'y adonner.
Aujourd'hui, les associations, sportives en particulier, sont concurrencées par l'ouverture de l'école le mercredi et sont de ce fait obligées de décaler les créneaux dédiés aux jeunes sur le samedi où elles sont alors concurrencées par les parents qui considèrent avoir autre chose à faire à ce moment là que de conduire leur chérubin au club de foot ou de tennis.
A terme, si le dispositif devait se généraliser à la rentrée 2014, cet effet pervers ou collatéral de la réforme causera vraisemblablement de gros soucis d'organisation et financiers aux associations. Pas sûr que ce point de vue ait déjà été inclus dans les réflexions-débats actuels.
Au final, c'est le système éducatif global des jeunes qui est peut être à revoir. Qui fait quoi ? A l'école l'apprentissage des savoir et aux associations la découverte d'activités culturelles ou sportives ? Si on pense épanouissement de l'enfant en rapport à son système de fonctionnement, c'est l'école qui devrait coiffer l'ensemble. Si je prends l'organisation du sport en France, l'initiation aux disciplines revient aux associations hors du temps scolaire, sur la base du bénévolat, avec ses avantages et ses inconvénients. Autant de propositions d'activités qui viennent se superposer sur le programme scolaire. L'adulte a revendiqué les 35 h. A côté de cela, il n'hésite pas "à charger" en heures sa jeunesse, selon le principe du "d'abord moi, ensuite l'autre"...
Si vraiment on veut aider l'enfant à grandir, le bon sens voudrait que l'école prenne en charge l'initiation à l'activité corporelle via des pratiques sportives, notamment durant les créneaux de chutes d'attention. Mais cela serait révolutionner tout un système, celui du "chacun pour soi", plutôt que favoriser une harmonisation de l'emploi du temps de l'enfant. Il suffirait par exemple, de recourir aux innombrables éducateurs sportifs diplômés qui vivent mal leur profession, faute d'embauches par le milieu, en créant un corps d'éducateurs territoriaux mis à disposition de l'école et des associations. En ces temps de chômage galopant, ce serait en plus un moyen de faire baisser les statistiques qui préoccupent tant les esprits de nos dirigeants politiques.
Maintenant quel politique veut se mettre à dos non seulement l'Education Nationale par une réforme de tout le système, mais en plus le milieu associatif qui verrait certainement d'un mauvais œil la perte d'une "clientèle" qui souvent lui permet de financer le "sport adulte" ?
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