Aller au-delà du maïs responsable du cannibalisme du hamster ?

Depuis une semaine, la "Hamster-sphère" s'agite beaucoup autour de l'étude scientifique du CNRS avec une expérience sur l'alimentation du grand hamster au maÏs, et la conclusion dégagée, "la monoculture du maïs entraîne un déficit en vitamine B3 qui explique les comportements infanticides". En effet, un groupe de femelles nourries avec des vers de terre et du maïs ignoraient leurs progénitures et finissaient par les dévorer, alors qu'un autre alimenté avec du blé et des vers de terre réchauffait et allaitait les petits. http://www.sciencesetavenir.fr/animaux/comment-un-regime-au-mais-transforme-le-grand-hamster-d-alsace-en-rongeur-infanticide_110225#comments

Il n'en fallait donc pas plus pour faire les choux gras de la presse avec des titres racoleurs autour du cannibalisme et accuser le maïs de contribuer à la disparition du hamster, à côté du renard, des buses et de l'urbanisation.

Plusieurs commentaires me chatouillent pour ne pas dire me hérissent à travers les lectures des articles parues dans le Monde, l'Express, France Info ou Science et Avenir. D'abord, le coup du grand hamster, "une espèce emblématique d'Alsace",  il faut que "Bernadette se calme" !  Certes, loin de moi de vouloir dresser une liste hiérarchique des animaux "emblématiques" derrière la cigogne certainement n°1 et la plus représentative de l'Alsace, mais le hamster n'a jamais imprégné les esprits des Alsaciens, si ce n'est celui du monde agricole qui l'a pourchassé ardemment dans les années 60. Le petit gibier, en particulier le lièvre représente, du moins représentait beaucoup plus la petite faune au même niveau que le cerf actuellement dans nos forêts ou les Vosges.  Mais voilà, placer du petit gibier comme animal emblématique et faire campagne pour sa sauvegarde avec des fonds publics, ça ferait tâche pour beaucoup de défenseurs de la biodiversité, donc inconcevable.

Par ailleurs, le raccourci fait par l'étude scientifique ne me paraît pas plus convaincant non plus, même si bien sûr, je ne peux qu'émettre une opinion. Il n'en reste pas moins que si vous discutez avec d'anciens piégeurs du hamster et donc bons connaisseurs de son éthologie, il y a de quoi s'interroger quelque peu. Comment vivait le hamster ?

Oui, il proliférait lorsque la plaine d'Alsace n'était pas encore remembrée et que les cultures étaient diversifiées et en mosaïques, soit avec de petites parcelles. Donc, lorsque le parcellaire a été changé pour passer du "cultivateur" à l'agro-industriel, oui son habitat a été détruit et les campagnes d'éradication ont accéléré sa perte. Oui, le maïs de par son mode cultural et d'exploitation a contribué à sa perte mais avant tout par la destruction de ses terriers et non par son ingurgitation qui le conduirait à négliger sa reproduction.

Ensuite, comment le hamster se nourrit-il ? Il fait des réserves dans son terrier dès que sa nourriture favorite est présente, à savoir blé, orge et luzerne. D'où l'expression typiquement alsacienne "hamstere". Une fois le garde-manger rempli, il ne peut stocker davantage de nourriture. Donc lorsque le maïs arrive à maturation, nous sommes en septembre, à une période où "son congélateur est plein". Pourquoi irait-il encore prendre du maïs accroché de plus en hauteur (si d'aventure, il sait le détacher), pour l'amener vers un terrier qu'il ne peut tenir dans un champ de "pop corn" ? Le régime alimentaire en laboratoire, à base de maïs peut donc effectivement être incriminé (d'ailleurs dans l'étude, était-il bio ou sous traitement Monsanto ?), mais c'est bien tout. La cause de sa disparition est la perte de son habitat, tout comme pour le petit gibier, point barre.

L'étude n'amène donc rien de plus que ce que l'on sait depuis longtemps : rétablissez le biotope et vous aurez de la biodiversité. Alors à quand la grande alliance des chasseurs et défenseurs du grand hamster. Certainement pas pour demain, quand on sait qu'on en est encore et toujours à la contestation du tir de nuit du renard par les lieutenants de louveterie en zone hamster, sous prétexte que la preuve n'est pas apportée par le Préfet que le renard mange les hamsters lâchés.

Bref, beaucoup d'hypocrisie dans l'histoire de la réintroduction du grand hamster qui touche qu'on le veuille ou non à des sujets sensibles qui vont dans le sens du chasseur, comme l'influence de la prédation au sol et dans les airs de la petite faune, en plus de la problématique de la disparition des zones non cultivées ou des biotopes. Le monde de la chasse a initié deux suivis l'un à partir de la perdrix, cf lien sur l'étude Pégase

http://www.oncfs.gouv.fr/IMG/file/oiseaux/galliformes/plaine/perdrix_grise_dossier_PeGASE_FS298.pdf

et l'autre à partir d'un suivi sur le renard dans le 76. Que voulez-vous dire de plus ?