
Le monde agricole, comprendre syndical, sort actuellement la lyre pour faire connaître médiatiquement ses pleurs et malheurs face à la canicule qui assèche les maïs, soit principalement la matière première fourragère des bovins. Il fut un temps, avant le passage à l'hyper productivité laitière, où la vache soit pâturait au pré, soit ruminait en stabulation le foin récolté en sortie de printemps avec des compléments de luzernes fraîchement fauchée ou des betteraves fourragères. C'était le temps de la polyculture avec des plantations saisonnières adaptées aux estomacs des bêtes.C'était le temps de la qualité et non de la quantité ou des surplus. C'était le temps où la France n'avait pas encore épousé les modèles importés d'outre-atlantique, découvert les "vertus" de l'ensilage et succombé aux "grains d'or" produits par le maïs. C'était le temps où en été il faisait déjà chaud, mais où il n'y avait pas de cultures nécessitant de la pluie ou de l'irrigation. C'était le temps où il était normal d'avoir chaud en été et froid en hiver. C'était le temps où le monde n'était peut-être pas encore fou.
Alors, tant que les terres n'étaient pas épuisées par perfusion chimique, tant que l'eau coulait de partout et que les nappes phréatiques affleuraient la surface du sol, c'était "Disneyland" pour le monde agricole, l' ivresse du gain sans fin, la fête au Crédit Agricole et à la CMDP. Aujourd'hui, les sources se tarissent, l'artificialisation des terres dérive l'alimentation en eau de pluie des sols et le changement climatique rend les chutes de pluies de plus en plus rares mettant le monde agricole dans la misère. Pourtant cela fait des années que des sonnettes d'alarme ont été agitées pour dire que les "modèles de culture" prônées par les productivistes, les machinistes et les chimistes vont conduire dans le mur. Aujourd'hui le pouvoir politique français veut mettre un milliard d'euros dans le nourrain agricole pour acheter la paix sociale, quant au monde agricole il fait savoir que cela ne suffira pas à sauver les exploitations en péril "climatique".
A côté de cela, vous avez des exploitants qui depuis des années ont anticipé le risque du changement climatique et travaillé sur l'amélioration de la qualité du sol et du rendement des cultures ou sur la bonne gestion de l’eau et des éléments nutritifs. Beaucoup d'entre eux ont été pris pour des "bobos" quand ils parlaient de s'inspirer du cycle des forêts qui nourrit et protègent les sols, de revenir aux rotations des cultures, aux friches régénératrices des sols et productrices de biodiversité, aux semis directes sur récoltes, voire à l’agroforesterie.
Continuer à produire en 2019 du maïs en Haute-Garonne de façon conventionnelle est une hérésie, implanter des cultures dans des sols impropres sauf à les booster à l'azote sous prétexte d'agrandir une exploitation ou toucher une prime de l'Europe est coupable, déraciner les arbres des anciens, arracher les haies, faire remonter par le labour des bactéries incapables de vivre à l'air libre et inversement en enfouir d'autres nécessitant de l'oxygène sont autant d'actes qui ne mériteraient plus aides et subventions. Une telle orientation politique n'est pourtant pas prête de voir le jour face à "l'establishment" en place.
Dans un autre monde d'intérêts, celui du BTP, la canicule est également au révélateur médiatique. De plus en plus de zones urbaines demandent le classement en catastrophe naturelle de maisons laissant apparaître d'importantes fissures, au point de les rendre inhabitable. Qui est responsable ? Le climat où ceux qui ont construit, qui ont autorisé, qui ont fait les plans. Il fut un temps où les maisons se montaient sur une cave et non sur une dalle en béton. Il fut un temps où l'on ne construisait pas n'importe où n'importe comment pour tenir des prix, attirer des primo-accédants, développer de la croissance selon le principe que quand le bâtiment va tout va. Ceux qui ont gagné l'argent de la construction sont au chaud depuis longtemps et le vrai responsable n'est pas le climat, il est juste le révélateur des errements d'une société incapable d'opérer à temps un 360° vers une agriculture régénératrice comme une des solutions climatiques, de sortir de l'idolâtrerie du BTP, premier secteur de l'artificialisation des sols.